Le 30 janvier, lors de la dernière séance du conseil communautaire, Rémy Batiot, vice-président de Le Mans Métropole en charge de la voirie, est intervenu au sujet d’une subvention correspondant aux périodes de gratuité demandées exceptionnellement par Le Mans Métropole à Cénovia au moment des gilets jaunes (fin décembre 2018 janvier 2019) et récemment (décembre 2019).
Écoutez l’intervention de Rémy Batiot :
La subvention qui sera versée à Cénovia s’élève à 33 768.40 €. Cette subvention compense le manque à gagner pour Cénovia, mais le manque à gagner pour Cénovia n’est pas identique au coût pour la collectivité.
En effet lorsque Cénovia touche ses recettes sur les parkings, elle ventile les recettes selon une clé de répartition intégrant une part (40% de la recette) qu’elle garde pour elle, et une redevance variable (60% de la recette) qu’elle reverse à Le Mans Métropole.
Ce que nous remboursons à Cénovia c’est donc le manque à gagner pour elle c’est-à-dire la part variable (40% de la recette) et quelques frais en plus pour reprogrammer les horodateurs.
Cette somme est de 33 768.40€ montant de la subvention de compensation.
Par contre, le manque à gagner pour la collectivité est bien plus important : car il y a les 40 % de la recette attendue, que nous remboursons à Cénovia, mais aussi les 60 % que Cénovia ne reversera pas sur cette recette attendue mais non perçue.
Au final, ce n’est pas 33 768.40€ que la collectivité va perdre mais au moins 81 000€. Plus du double.
Mais après tout 81 000 €, si c’était réellement efficace pour nos commerces de centre-ville, pourquoi pas.
En réalité, il manque à cette délibération, un bilan, une évaluation par rapport à l’objectif recherché de soutenir notre commerce de centre ville en incitant plus de gens à venir en ville en voiture.
Heureusement vos élu-e-s écologistes sont là et nous vous avons préparé une petite analyse :
Déjà sur le principe, nous pouvons souligner que cet objectif va à l’encontre des grands enjeux écologiques du moment : le fait d’inciter à utiliser sa voiture pour venir en ville n’est pas très raccord avec l’urgence climatique.
Faute de répondre à l’urgence climatique, répond-t-on au moins à l’urgence commerciale ?
En termes de fréquentation : nous avons eu en moyenne seulement 170 véhicules supplémentaires par jour (versus 2017). Nous dépensons au moins 81 000 € pour un effet minime.
Cette modeste augmentation de véhicules s’est portée :
– Sur les petits parcs halles et médiathèque.
– Et deux parcs dont la progression est déjà régulière (même sans gratuité cela augmente) : République (effet rénovation) et Jacobin aérien.
Donc difficile de savoir ce qu’aurait déjà été l’augmentation même sans la mesure de gratuité. Pour mémoire sans mesure de gratuité la fréquentation de nos parcs augmente déjà chaque année en moyenne de 3,1%.
A l’inverse cela a eu un effet négatif sur Jacobins qui s’est retrouvé saturé sur des jours déjà denses en version payante.
Concernant l’attractivité commerciale :
- Ces 170 véhicules supplémentaires par jour ne signifient pas forcément 170 clients en plus pour les commerces. Rien ne prouve que tous sont venus en ville pour faire des achats. C’est même plus que probable mais comme la gratuité n’était pas liée à l’acte d’achat, on ne pourra jamais le savoir précisément.
- Parmi les 170 conducteurs supplémentaires, sans la gratuité, il est probable aussi qu’un certain nombre de personnes serait tout de même venu en ville par un autre moyen. On peut donc raisonnablement penser qu’une part de ces 170 personnes auraient malgré tout fréquenté nos commerces de centre-ville.
Nous pouvons donc parler d’un impact mineur sur la fréquentation des parcs de centre-ville et encore plus minoré sur sa dynamique commerciale.
A ce sujet, nous vous conseillons la lecture d’un article édifiant du mensuel Alternative Economique intitulé de façon évocatrice : « commerce de proximité : en finir avec le dogme du no parking no business »
Cette initiative aura au moins eu le mérite de nous avoir montré qu’il ne faut pas lier la gratuité du stationnement à la fréquentation du centre-ville et encore plus de ses commerces.
Nous espérons qu’à l’avenir nous saurons tirer profit de cette initiative et que nous saurons utiliser l’argent public à meilleur escient.
Et si nous souhaitons récompenser les automobilistes consommateurs, faisons au moins en sorte que la gratuité soit liée à l’acte d’achat.
Mieux encore, pour mettre en pratique les beaux discours écologistes, désormais largement repris, mais pas toujours bien compris, pourquoi ne pas plutôt envisager de lier la gratuité du transport en commun à l’acte d’achat. Un ticket SETRAM remboursé pour un achat.
Et d’ores et déjà, l’année prochaine nous proposons que ce budget de 81000 € soit consacré intégralement à une belle opération d’embellissement et surtout d’animation du centre ville pour le bénéfice de tous. Et nous sommes sûrs que cela amènera une fréquentation bien plus importante à nos chers commerces.